LES MACHINES A CARTES PERFORÉES
I. -- PERFORATION, VÉRIFICATION ET CLASSEMENT
PAR
G. L BLANCHARD Licencié en droit
1° DEUX NOTIONS FONDAMENTALES
Dans son exposé si documenté sur l'invention de Pascal, M. Jean Chevalier nous
laissait entrevoir l'extraordinaire développement des moyens perfectionnés de
calcul.
Avant de parler de ces moyens perfectionnés que l'on a coutume de nommer, d'un
terme peut être impropre, machines à statistiques ou machines à cartes
perforées, il est nécessaire d'insister sur deux idées fondamentales
s'appliquant aussi bien à la science statistique qu'à la comptabilité,
Il faut d'abord que l'observation initiale des faits soit exactement transcrite
sous forme numérique, sans confusion possible d'unité de mesure sur la pièce qui
servira de base aux calculs, et que les calculs ne puissent être entachés
d'erreurs.
Il faut ensuite que la pièce initiale porte des références à des classements
multiples, références sans lesquelles l'exploitation ultérieure serait très
limitée, et, qui permettent seules d'obtenir un degré de généralité
véritablement scientifique.
2° COMPTABILITÉS
Quoi qu'il en soit de la diversité d'objets des différentes comptabilités, il
est remarquable que l'on y trouve toujours des systèmes de comptes qui mettent
en leu trois mêmes notions fondamentales
a) Une notion quantitative, expression numérique de la valeur d'un objet ou d'un
service que cette valeur soit exprimée en unités monétaires ou en unités de
mesures quelconques.
b) Une notion de classification, discrimination des groupements particuliers
dans lesquels doit être placée la valeur considérée.
e) Une notion chronologique exprimant la date précise à laquelle s'opère la
classification.
- Une désignation chiffrée ;
- Une référence de classements ;
- Une date.
3° IDENTITÉ DE LA COMPTABILITÉ ET DE LA STATISTIQUE
Il existe bien une science statistique, science qui tient de la mathématique
appliquée, mais qui a un objet et une nature propres. Cet objet ne saurait être
confondu avec le système de décompte qui sert simplement de moyen
d'investigation ou plutôt de moyen de transcrire les investigations ; de même la
comptabilité n'est qu'un ensemble de méthodes ayant un caractère commun, l'usage
des comptes.
On voit ainsi tout de suite le point de contact de la statistique et de la comptabilité. C'est l'utilisation de comptes qui font usage de l'arithmétique simple.
4° PROPRIÉTÉS DES OPÉRATIONS ARITHMÉTIQUES SIMPLES
Les propriétés des opérations arithmétiques simples qui sont à la base des
premiers décomptes statistiques, comme de la comptabilité sont, l'associativité,
la commutativité et la distributivité.
On sera dans le vrai chaque fois qu'en inventant des procédés pour produire
mécaniquement des comptes on ne perdra pas de vue ces propriétés intrinsèques
des opérations arithmétiques et que l'on n'en négligera aucune. On sera tout
près de l'erreur dans le cas contraire. De même quand on se rappellera que le
raisonnement mathématique par excellence est la récurrence, on aura peu de
chances (le se tromper. Si l'on veut, se fier à des intuitions, il y a au
contraire gros à parier que l'on fera fausse route.
5° DÉFINITION
Le matériel utilisant les cartes perforées répond-il à ces conditions? C'est ce
que nous allons essayer de démontrer.
On le nomme communément Machines à cartes perforées ou Machines à statistiques.
Ces deux dénominations sont l'une et l'autre insuffisantes, la première, parce
qu'elle n'a qu'un sens instrumental, et la seconde parce qu'elle indique un but
qui est aujourd'hui largement dépassé.
En réalité, il s'agit d'un groupement combiné de machines dont aucune ne peut
être employée isolément : groupement qui est destiné, d'une part, à fixer
matériellement, une fois pour toutes, les données qualitatives et quantitatives
des faits à traduire en comptes, et d'autre part, à fournir ultérieurement, sans
phase intermédiaire, toutes les synthèses comptables et statistiques dont on
aura besoin. La véritable désignation, que nous empruntons au Contrôleur Général
de l'Armée Carmille, sera donc forcément un peu longue:
- Ensemble mécanographique à cartes perforées pour l'établissement des
statistiques et des comptabilités.
Cet ensemble comprend quatre éléments principaux : la carte, la perforatrice, la
trieuse, la tabulatrice.
- La carte perforée est la traduction matérielle, d'après des codes
conventionnels, de renseignements figurant en lettres et en chiffres sur le
document élémentaire de base.
Elle comporte un certain nombre de colonnes dont chacune a dans le même ordre
les chiffres arabes de 0 à 9. La perforation d'un chiffre déterminé dans une
colonne déterminée correspondra aux mêmes chiffres du document de base dont la
place est également définie dans la contexture de ce document. Des perforations
dans une zone de colonnes de la carte correspondront soit à un nombre du
document de base, soit à une codification numérique d'une désignation de ce même
document, c'est-à-dire que nous obtiendrons ainsi les éléments reconnus
essentiels de la pièce de base:
- Le nombre qui exprime une valeur ;
- La référence de classement ;
- Une date.
La perforatrice permet d'effectuer : la perforation manuelle des données originales ; la perforation automatique de certaines données communes à plusieurs cartes ; certains calculs et la perforation de leurs résultats.
La trieuse classe les cartes dans l'ordre désiré pour l'impression.
La tabulatrice comptabilise, puis imprime les états et tableaux comptables ou statistiques.
6° LA PERIODE D'INVENTION : 1885-1890
C'est pendant cette période de cinq années que se transformèrent la plupart des entreprises américaines. Cette période coïncide avec le développement des chemins de fer et les premières applications industrielles de l'électricité : éclairage électrique, moteurs à courant alternatif.
Le développement industriel qui en résulta montra rapidement l'insuffisance des méthodes existantes d'organisation et de contrôle ; c'est pourquoi de tous côtés, on se mit à chercher la solution de ces nouveaux problèmes.
Année 1885 : invention de la Balance calculatrice.
Année 1885 : le Docteur Hollerith, statisticien distingué auquel le Gouvernement
Américain avait eu recours pour le dixième recensement, étudiait un problème en
apparence entièrement différent, mais qui présentait néanmoins avec le précédent
ce point commun : la recherche de l'augmentation de la vitesse et de la
précision des méthodes d'organisation commerciale.
Le dépouillement du dixième recensement représentait un travail si, considérable
qu'avec les anciennes méthode-, les résultats n'auraient pu être connus avant,
le début du recensement suivant.
Le Docteur Hollerith imagina une machine à classer les documents qui permit de
terminer le dixième recensement en 1887.
Le système du Docteur Hollerith consistait essentiellement à enregistrer les
facteurs relatifs à une situation donnée (par exemple les caractéristiques de
recensement d'un individu) en perforant des trous d'une façon appropriée sur une
feuille de papier. Au début, il utilisa des bandes perforées, mais trouva
rapidement plus efficace d'utiliser un carton individuel pour chaque fait. Un
code préalablement établi attribuait à chaque emplacement. de la carte une
signification déterminée. Une perforation donnée actionnait. électriquement des
mécanismes appropriés qui donnaient finalement des résultats additionnés.
Avant que sa machine ne soit utilisée par la Commission du recensement, le
Docteur Hollerith établit avec celle-ci, pour la ville de Baltimore, (les
statistiques de mortalité. Il eut pour client le Bureau des statistiques de New.
Jersey et la Commission d'hygiène de New-York. Ses efforts furent couronnés par
un succès complet.
Année 1888: invention d'un appareil de pointage des heures d'entrée et de sortie des ouvriers.
Année 1889 : une commission de trois statisticiens engagés par l'Office du
recensement procédait à des essais pratiques et approfondis de toutes les
méthodes mécaniques alors connues permettant de compter, ventiler et additionner
les renseignements indispensables au onzième recensement qui devait avoir lieu
l'année suivante.
Le 30 novembre 1889, cette commission remit un rapport favorable au procédé par
cartes perforées. Ce rapport concluait que grâce au procédé et aux machines du
Docteur Hollerith, la vitesse de transcription était supérieure à celle de tous
les autres systèmes proposés et la vitesse de totalisation huit fois plus
élevée.
Le résultat fut que le Gouvernement des Etats-Unis adopta officiellement la
méthode du Docteur Hollerith pour ses travaux de recensement. Le onzième
recensement des Etats-Unis, commencé en 1890, attira l'attention du monde
entier. C'était la première fois qu'un semblable travail était réalisé
mécaniquement.
Cartes et machines. - Les cartes utilisées étaient perforées par une machine d'un aspect très primitif. Elle était composé d'un plateau perforé ou clavier, et d'un index qui se déplaçait au-dessus de lui. Les mouvements de celui-ci étaient transmis, à échelle réduite, par un système de pantographe, à un poinçon placé à l'arrière de l'appareil et au-dessus de la carte. Chaque perforation du plateau avait une signification précise déterminée par un code.
Fig. 32. -- Perforatrice pantographique du Dr Hollerith.
La machine appelée Tabulatrice, qui enregistrait et additionnait les indications
perforées sur les cartes, ressemblait à un petit piano droit.. Elle se divisait
en trois parties
1° Le mécanisme d'exploration ou contacteur placé à droite de l'opérateur ;
2° Les compteurs situés dans un plan vertical en face de l'opérateur ;
3° La trieuse indépendante située à droite de l'ensemble précédent.
Le mécanisme d'exploration était constitué, par une tête mobile commandée par un
levier et portant autant d'aiguilles que de positions de perforation possibles
sur la carte.
La table d'exploration en matière isolante sur laquelle on plaçait la carte
était constituée par autant de godets remplis de mercure que de positions de
perforation possibles. Lorsqu'on abaissait le levier porte-aiguilles, seules les
aiguilles se trouvant en face des perforations de la carte pouvaient s'abaisser
et entraient en contact avec le mercure des godets. Les circuits ainsi fermés
actionnaient des compteurs correspondant aux perforations lues.
Si pendant la totalisation, on voulait en même temps classer les cartes dans un
ordre déterminé on utilisait la trieuse. Celle-ci était divisée en 26
compartiments. Chacun d'eux était fermé par un couvercle qui s'ouvrait sous la
détente d'un ressort et était maintenu fermé par un taquet. Les électros
actionnant ces taquets étaient reliés aux différents godets suivant le tri que
l'on voulait obtenir., Au moyen de la perforation en un endroit déterminé on
établissait un circuit à travers l'électro-aimant, qui en agissant sur le
taquet, libérait le couvercle correspondant.. Ce dernier restait ouvert jusqu'à
ce que la carte soit déposée dans le compartiment voulu et était ensuite refermé
à la main.
Fig.33.--équipement Hollerith 1889
Les premières trieuses et tabulatrices construites par le Docteur Hollerith ne
ressemblaient pas aux machines actuelles, mais leur principe n'a pas changé.
L'œuvre du Docteur Hollerith a été si clairement conçue et si soigneusement
réalisée qu'il n'a jamais été nécessaire de faire subir de changements notables
aux principes fondamentaux de la Perforation, du Tri et de la Tabulation ; et
cela malgré les applications très étendues de ces méthodes. Le grand succès
remporté par le système Hollerith dans les travaux du onzième recensement des
Etats-Unis, conduisit l'Autriche-Hongrie à l'adopter pour le même travail
l'année suivante.
A la même époque (1891) des études furent entreprises pour adapter les
machines à la vérification des comptes de transport de chemins de fer et à
l'analyse des statistiques de transport des marchandises.
Les expériences du New-York Central furent à leur tour, le point de départ de
nouvelles applications.
Les quatre éléments de base, carte, perforation, tri et tabulation demeurèrent
semblables, mais les machines elles-mêmes subirent de profondes modifications et
bénéficièrent de nombreux perfectionnements.
En 1907, un ingénieur américain, Mr. James Powers, construisit, avec plein
succès, un nouveau type de machines à statistiques, dont le principe consiste
dans l'exploration des cartes à l'arrêt par un dispositif mécanique.
Les machines électriques, de leur côté, avec les Ingénieurs Américains Ford,
Lake et Pierce, l'Ingénieur Norvégien Bull, firent des progrès considérables et
amenèrent le matériel au point de perfection où nous le trouvons aujourd'hui.
Fig. 34 Tabulatrice alphanumérique connectée à une perforatrice
1. - PERFORATRICES ET VéRIFICATRICES
A CLAVIER
A. - PERFORATRICES SIMPLES
1° Perforatrice mécanique. Cette machine comporte 12 touches de
perforation d'une cotonne de la carte. Dix touches sont numérotées de 0 à 9. La
onzième touche perfore la position située juste au-dessus du « 0 ». Son rôle est
de perforer un renseignement représenté par la perforation « 11 ». La
touche « 12 » perfore la position située immédiatement au-dessus du « 11 ».
Une touche d'espacement fait avancer la carte d'une colonne sans la perforer.
Une autre touche provoque la libération du chariot vers la gauche et permet
ainsi de retirer la carte qui y est logée.
Fonctionnement. - L'opérateur place une carte sur le chariot
porte-carte après que celui-ci a été libéré vers l'extrême-gauche, puis la carte
est introduite en position de perforation en poussant vers la droite le chariot.
Toutes les fois qu'une touche est enfoncée, le chariot se déplace d'une colonne
vers la gauche.
Lorsque les renseignements ont été perforés sur la carte, l'opérateur la retire,
après renvoi de la carte, si nécessaire, alimente une nouvelle carte et répète
l'opération décrite précédemment.
Certaines particularités de cette machine en facilitent le fonctionnement. Une
butée réglable permet à volonté de commencer la perforation à n'importe quelle
colonne de la carte. Après perforation d'une colonne, celle-ci devient visible.
De plus, lorsqu'une carte est en position de perforation de la colonne 1, les
dernières 31 colonnes de la carte sont visibles à droite. Cette particularité
est avantageuse dans le cas où l'on utilise des cartes documents.
Plusieurs touches peuvent être enfoncées en même temps s'il est nécessaire
d'effectuer plusieurs perforations dans la même colonne, cas des perforations
alphabétiques qui sont une combinaison codifiée de 2 perforations.
Il est possible également sur cette machine de sauter à volonté certaines zones
de la carte si celles-ci ne doivent pas être perforées.
2° Perforatrice électrique. - Sur la perforatrice électrique les
perforations dans la carte sont effectuées par l'action d'un électro-aimant
tandis que sur la perforatrice mécanique elles le sont par pression directe des
doigts. L'opérateur déploie donc un effort bien moindre lorsqu'il appuie sur une
touche qui ferme seulement un circuit électrique, cas de la perforatrice
électrique, que lorsqu'il doit exercer une pression suffisante pour découper une
perforation dans la carte, cas de la perforatrice mécanique. Il en résulte que
la fatigue de l'opérateur est considérablement diminuée, et que son rendement en
est proportionnellement augmenté.
3° Perforatrice électrique à alimentation de cartes et éjection automatiques. - Le fonctionnement de cette machine a été rendu aussi automatique que possible. La main droite de l'opérateur n'a pas à quitter le clavier de la perforatrice. La main gauche ne lui sert qu'à tourner les pages des documents à transcrire. La simplicité du clavier et la douceur de frappe, l'élimination de toute manutention de cartes, rendent l'utilisation de cette machine très supérieure à toute autre méthode de transcription de documents. Cette supériorité se traduit par une réduction de fatigue pour l'opérateur et comme conséquence une augmentation d'exactitude et de rendement.
Fig. 35. - Multiperforatrice numérique.
4° Perforatrice numérique imprimante. - Certaines perforatrices impriment
automatiquement sur le bord supérieur de la carte les renseignements qu'elles
perforent,
5° Perforatrice alphanumérique imprimante. -- La perforatrice alphanumérique transcrit les données numériques et alphabétiques sous forme de perforations et d'impressions. La machine possède un clavier dont les touches numériques et alphabétiques se présentent dans le même arrangement que sur un clavier normal de machine à écrire. L'alimentation et l'éjection des cartes sont automatiques, de plus, la pression à exercer sur les touches est très faible étant donné que tout mouvement des poinçons et des barres d'impression est commandé par un moteur. La douceur de frappe et l'automaticité des opérations, l'impression en clair des données perforées, confèrent à cette machine des qualités d'exactitude et de rendement.
B. - PERFORATRICES AVEC DISPOSITIF DE DUPLICATION
1° Multiperforatrice numérique. - Elle ressemble beaucoup à la
Perforatrice automatique tant par son aspect que par son fonctionnement, mais
l'adjonction d'un dispositif de lecture permet la transcription automatique de
renseignements communs à plusieurs cartes à partir d'une carte maîtresse
pré-perforée, et la perforation manuelle de renseignements complémentaires
particuliers a chacune des cartes.
Cette fonction de duplication joue un rôle extrêmement important dans la méthode
de codification automatique. Des cartes maîtresses perforées renferment toute la
codification se rapportant à certains travaux. Elles sont classées dans un
fichier. Selon les besoins, elles sont extraites du fichier placées dans le
dispositif de lecture, elles reproduisent automatiquement ces codes sous forme
de perforations dans les cartes de détail.
L'utilisation de cette fonction de duplication peut effectivement remplacer
quatre opérations manuelles
1° Codification des documents ;
2° Vérification de la codification ;
3° Répétition de la perforation de renseignements communs ;
4° Vérification de cette perforation.
Elle permet également de reproduire des cartes qui se trouvent abîmées par suite
d'un usage trop long ou inconsidéré. La nouvelle carte qui remplace la carte
abîmée est reproduite de cette manière d'une façon rapide et rigoureusement
exacte.
2° Poinçonneuse automatique - Elle se compose essentiellement d'un
bloc de poinçons correspondant à toutes les perforations possibles de la carte.
L'enfoncement de ces poinçons constitue le cliché de perforation.
Il se fait par l'intermédiaire de plongeurs disposés au-dessus des pointons et
actionnés eux-mêmes par des biellettes situées sur un chariot qui se déplace sur
toutes les colonnes de la carte. Les biellettes sont mises elles-mêmes en
mouvement par les touches du clavier au moyen d'une liaison par bowden.
Il en résulte les avantages suivants:
1 ° Conservation des constantes ;
2° Possibilité de corriger les erreurs en cours de perforation de la carte ;
3° Centrage rigoureux des perforations ;
4° Possibilité de perforer en série.
3° Multiperforatrice alphabétique imprimante, - Elle possède toutes les
caractéristiques de la perforatrice alphanumérique imprimante. Elle est munie de
plus, d'un magasin de duplication permettant la transcription automatique de
constantes sous forme de perforations et de caractères imprimés.
Fig. 36. - Multiperforatrice alphanumérique.
C. - VÉRIFICATRICES
Les vérificatrices sont des machines à clavier dont le rôle est de vérifier
l'exactitude de la perforation des cartes. La théorie sur laquelle repose la
vérification par cette machine est la même que pour tout autre genre de
vérification, c'est-à-dire qu'un même travail répété par une deuxième personne
révèlera les erreurs commises par la première.
Les vérificatrices possèdent cette particularité que la perforation d'une
colonne en cours de vérification n'est pas vue par l'opérateur, ce qui supprime
toute suggestion visuelle. En conséquence la vérification mécanique réduit
considérablement le hasard, dû à l'élément humain, inhérent à tout contrôle, et
donne une preuve définitive de l'exactitude de la perforation.
1° Vérificatrice mécanique. - La carte à vérifier est placée dans la machine et l'opérateur, lisant les documents originaux enfonce les touches comme s'il perforait. La dépression d'une touche provoque l'enfoncement d'un plongeur à travers la perforation de la carte, et celle-ci avance d'une colonne. Si le plongeur ne rencontre pas de perforation, la carte n'avance pas, attirant l'attention de l'opérateur sur l'erreur. L'opérateur effectue, sur-le-champ, une comparaison de la carte et du document original et note la correction à faire.
2° Vérificatrice électrique. - Sur ce modèle, la dépression de la touche correspondant au chiffre lu par l'opérateur ferme un contact, tandis que la perforation elle-même lue par un balai, par l'intermédiaire d'un autre contact, est susceptible de compléter le circuit électrique ébauché par la dépression de la touche. S'il y a correspondance entre la perforation lue et la touche, le circuit est complété, la machine avance d'une colonne, sinon, la carte n'avance pas. L'opérateur l'extrait et compare attentivement la perforation de la colonne suspecte avec le document. S'il y a erreur, la carte est refaite.
Fig. 37. - Vérificatrice universelle.
3° Vérification par ovalisation. - Après une première perforation
normale, les cartes sont passées dans une poinçonneuse produisant des
perforations légèrement décalées par rapport aux premières.
Toute perforation restée ronde décèle une erreur de perforation.
Les cartes sortant de la perforatrice ovalisante sont passées dans une machine
vérificatrice qui signale. automatiquement les cartes ayant une ou plusieurs
perforations rondes, c'est-à-dire les erreurs, en intercalant une carte de
couleur. D'autre part, la simple vue d'une carte permet de se rendre compte si
elle a été passée ou non à la vérification.
II. -- PERFORATRICES AUTOMATIQUES
A. - REPRODUCTRICES
Les reproductrices apportent de nouvelles possibilités dans l'application de la
carte perforée car elles éliminent pratiquement toute une série d'opérations
accomplies jusque-là manuellement ou se mi-mécaniquement.
Leur rôle est en effet, de perforer automatiquement sur un grand nombre de
cartes tout ou partie des données perforées sur d'autres cartes.
a) La Reproductrice. - La Reproductrice est en même temps une
Perforatrice en série et une Reproductrice de jeux de cartes.
1 ° Elle permet de perforer dans un jeu tout ou partie des perforations faites
dans un autre jeu de cartes ;
2° Elle permet de perforer en série dans un groupe de cartes les données
contenues dans une seule carte ;
3° Elle permet de combiner ces deux fonctions dans une seule opération.
La mise en relation des différentes unités de la Reproductrice par un tableau de
connexions amovible en fait une machine très souple, aux possibilités les plus
variées.
Fig. 38. - Reproductrice.
b) La Reproductrice comparatrice. - La reproductrice comparatrice a
les mêmes caractéristiques et les mêmes possibilités que la Reproductrice. Elle
permet, en outre, de comparer électriquement les perforations effectuées sur de
nouvelles cartes avec celles des cartes originales.
1° Comparaison des Cartes. - Deux jeux de cartes dont les perforations sont
identiques (ou dont certaines zones perforées sont identiques) peuvent être
comparés l'un avec l'autre. La comparaison s'effectue automatiquement carte par
carte. Lorsque les cartes ne sont pas identiques, la machine s'arrête.
2° Contrôle automatique. - Dans les opérations de reproduction, si des numéros
de contrôle sont perforés dans les jeux de cartes, celui qui doit être lu et
celui qui doit être perforé, on peut établir une connexion de contrôle
automatique entre ces deux jeux afin de s'assurer que les renseignements lus sur
une carte sont bien perforés dans la carte correspondante. Si les numéros de
contrôle ne sont pas identiques, la machine s'arrête automatiquement.
3° Vérification de la Reproduction. Il est possible de vérifier que les
renseignements qui viennent d'être perforés par la Reproductrice son bien
identiques à ceux lus sur les cartes originales. Cette vérification a lieu au
cours de l'opération de reproduction. Elle ne ralentit en rien la marche de la
Reproductrice. Toute différence entre la carte lue et la carte perforée est
signalée par l'arrêt de la machine.
4° Vérification de la perforation en série. - Il est possible de vérifier la
concordance entre les indications des cartes maîtresses et celles perforées en
série sur les cartes de détail de chaque groupe.
Si les cartes maîtresses afférant à un groupe et les cartes détail de ce même
groupe portent une indication commune perforée au préalable, on peut également
vérifier que les cartes d'un groupe se trouvent bien derrière la carte maîtresse
à laquelle elles se rapportent.
5° Perforation en série et vérification simultanée. - Une opération de
perforation en série et une opération de vérification de la perforation en série
peuvent être accomplis simultanément. En effet, des cartes sont perforées en
série dans une unité de la machine, tandis que d'autres cartes sont vérifiées
dans une autre unité. Les deux unités opèrent simultanément bien qu'elles soient
indépendantes fonctionnellement l'une de l'autre.
B. - CALCULATRICES
Il est souvent nécessaire d'effectuer des calculs tels que multiplications,
additions ou soustractions, etc... sur les documents originaux avant leur remise
au service de perforation.
L'emploi de la Calculatrice évite ces travaux préliminaires : il suffit de
perforer sur les cartes les éléments du calcul et de 1-es passer ensuite dans la
machine, qui effectue automatiquement les opérations voulues. La préparation
automatique de documents comptables est devenue ainsi une des applications de
base de la carte perforée.
Il existe deux modèles de Calculatrice : la Multiplicatrice et la Calculatrice
proprement dite. La première a des possibilités moins étendues que la deuxième.
a) La Multiplicatrice. La multiplicatrice est une machine à grand
rendement qui multiplie des facteurs perforés sur des cartes, perfore sur ces
mêmes cartes les résultats obtenus et accumule les produits. La machine
comporte, montés sur un bâti, un mécanisme d'alimentation et de lecture des
cartes, des compteurs de multiplication, de transfert et d'accumulation et un
mécanisme de perforation et d'éjection des cartes.
Un autre modèle comporte un clavier complet sur lequel peuvent être imposés les
facteurs, tandis que les résultats peuvent être, soit perforés sur des cartes,
soit imprimés sur une bande de papier, soit les deux en même temps.
Le principe de fonctionnement est extrêmement simple. Dès qu'une carte est
alimentée dans la machine, le multiplicateur et le multiplicande sont lus et
enregistrés dans les compteurs. La multiplication est aussitôt effectuée pendant
que la carte est amenée en position de perforation. Le produit est transmis
simultanément au mécanisme de perforation et au compteur de totalisation des
produits. La carte est perforée puis éjectée pendant la lecture des facteurs de
la carte suivante.
La Multiplicatrice possède un tableau de connexions qui permet les combinaisons
les plus étendues de lecture, de calcul et de perforation.
Fig. 39. - Calculatrice.
b) La Calculatrice . - La Calculatrice effectue toutes les opérations de
la Multiplicatrice. Elle résout, en outre, certains calculs d'addition et de
soustraction horizontales, combinés ou non avec la multiplication. Les résultats
de ces calculs sont perforés sur les cartes. Ils peuvent être également
accumulés dans un compteur totalisateur.
A B C D E représentant, des facteurs perforés
sur une carte, la Calculatrice peut effectuer les opérations suivantes et
perforer les résultats R et
S sur la même carte.
A x B. . . . . . . . . =R
A + B. . . . . . . . . =R
A+B+C. . . . . . . . . =R
A - B. . . . . . . . . =R
A-B-C. . . . . . . . . =R
A+B-C. . . . . . . . . =R
(A x B)+C. . . . . . . =R
A x B+C+ D . . . . . . =R
E + R. . . . . . . . . =S
E - R. . . . . . . . . =S
(R étant le résultat d'une des 8
premières opérations).
Un certain nombre de dispositifs supplémentaires peuvent être montés sur
cette machine. Les plus couramment employés sont
---Le dispositif de calcul automatique du timbre d'acquit ;
---Le dispositif d'arrondi aux 5 cmes supérieurs ou inférieurs et d'appoint ;
---Le dispositif d'addition carrée ;
---Le dispositif de vérification des différences d'index et de franchissement de
tranches appliqué dans les Compagnies de Distribution ;
---Le dispositif de double multiplication simultanée ;
---Le dispositif permettant la multiplication (le la somme de « n » facteurs
perforés sur des cartes différentes par un ou plusieurs multiplicateurs,
--- etc., etc...
III. - MACHINES DE CLASSEMENT
A. - LA Trieuse
La perforation une fois terminée, les cartes se trouvent dans l'ordre dans
lequel les documents ont été remis.
L'opération suivante, peut-être la plus importante dans l'utilisation des
cartes, consiste à les classer dans un ordre déterminé, c'est-à-dire à les
grouper suivant telle ou telle indication qui s'y trouve perforée et qui les
caractérise.
C'est le rôle de la Trieuse.
Fig. 40. - Trieuse Hollerith.
La Trieuse classe automatiquement les cartes perforées dans un ordre
numérique croissant ou dans des groupes de classification semblable dans l'ordre
numérique croissant. Le classement des cartes est réalisé à la vitesse de 400
cartes à la minute pour chacune des colonnes triées. Toutes les opérations à
effectuer pour faire fonctionner cette machine sont extrêmement simples.
L'opérateur se contente de placer un paquet de cartes dans le magasin
d'alimentation, d'amener le balai (le lecture sur la colonne à trier et
d'appuyer sur le bouton de démarrage.
Treize cases recueillent les cartes triées dont une, la case « Rebut » est
Prévue pour recevoir les cartes non perforées dans la colonne considérée; les
douze autres cases correspondant aux douze perforations possibles d'une colonne.
Chaque case a une capacité d'environ 800 cartes, et quand une case est pleine la
machine s'arrête automatiquement, attirant ainsi l'attention de l'opérateur. La
machine s'arrête également lorsque le magasin d'alimentation est vide.
Fig. 41. Trieuse Bull,
Il existe également une Trieuse dite « Compteuse » dont le rôle est de compter
les perforations situées dans une ou plusieurs positions d'une colonne donnée de
la carte et également de compter les cartes ne comportant aucune perforation
dans cette colonne. Le mécanisme de comptage se compose de 15 compteurs additifs
: 12 compteurs correspondant aux douze positions de perforation d'une colonne ;
un compteur pour les cartes non perforées; un compteur sous-total et un compteur
grand-total.
B. - L'INTERCLASSEUSE
Avant la mise en service de l'Interclasseuse, la Trieuse était la seule
machine capable de grouper les cartes perforées dans l'ordre désiré.
Parfaitement adaptée au classement des cartes dans la série croissante des
nombres, la Trieuse n'était pas d'un rendement aussi élevé quand il s'agissait
d'intercaler les cartes d'un jeu dans un autre jeu préalablement classé.
Dans une application de facturation, par exemple, ou de tenue de stock, il était
nécessaire d'effectuer un tri complet sur l'indicatif pour placer les cartes.
Nom et Adresse en tête des cartes Détail ou pour rapprocher les cartes Stock des
cartes Mouvement, et ceci quel que fût le classement antérieur des cartes. Ce
travail parfois très long, retardait considérablement le début des tabulations.
Fig. 42. - Interclasseuse.
Dans ces deux applications, parmi beaucoup d'autres, l'Interclasseuse vient
heureusement suppléer à la trieuse, réalisant sur celle-ci un gain de temps
considérable. Au cours d'un seul passage dans la machine, les cartes d'un même
jeu sont intercalées parmi celles d'un autre jeu à la condition que les deux
groupes de cartes soient classées dans le même ordre numérique.
Cette opération fondamentale, dite de fusion, peut comporter de nombreuses
variantes. L'Interclasseuse offre, pour les réaliser, des possibilités infinies
et permet, en outre
Le classement de certaines cartes et l'extraction de certaines autres ;
La substitution de certaines cartes à certaines autres en nombre non égal et non
proportionnel ;
L'extraction de certaines cartes à l'aide de cartes dites « Chercheuses »
portant des indicatifs des nombres ou des limites déterminées.
Par la multiplicité et la diversité de ses applications dont toutes ne sont pas
encore découvertes, cette machine fait partie de ces merveilles de la mécanique
dont M. Danty-Lafrance disait qu'elles suscitent l'enthousiasme, ainsi que
l'admiration pour tous les travaux des inventeurs français ou étrangers qui les
ont amenées à un tel degré de perfection.