Histoire de la Compagnie des Machines Bull

1948-1958



la description de cette période est encore incomplète, les archives de la Compagnie n'ayant guère été dépouillées.

Fin 1949, Georges Vieillard négocie un accord avec la Compagnie Remington Rand héritière de Powers et de Eckert-Mauchly. Cet accord valable 10 ans est un accord de licences croisées sur les brevets. Il apporte aussi à Bull des débouchés pour certains équipements électromécaniques (interclasseuses et calculatrices C3) qui seront achetés et revendues aux États-Unis par Remington Rand. 

Création du laboratoire d'électronique confié à Bruno Leclerc que viendra rejoindre Henri Feissel. Leurs premiers travaux portent sur:
-- l'amplification électronique de la lecture photo-électrique des perforations, avec la trieuse D remplaçant le modèle E12;
-- la lecture de marques, avec le photolecteur ; 
--enfin sur le calculateur électronique Gamma. 
Le Gamma 3 a été conçu par trois jeunes ingénieurs, Bruno Leclerc, Pierre Chenus, Henri Feissel, dont la tradition souligne qu'à eux trois ils n'avaient pas 100 ans. C'est une unité de calcul rapide qui effectue des opérations comptables et scientifiques pour le compte d'une machine à cartes perforées (tabulatrice BS 120) à laquelle il est connecté. Effectuant 5.800 opérations par seconde, il exécute les calculs entre 2 lectures de cartes, laissant la machine fonctionner à sa vitesse normale de 150 cartes minutes. L'innovation technique réside dans l'utilisation intensive de diodes au cristal de germanium : le Gamma 3 ne comporte plus que 400 tubes électroniques au lieu de 1.500 dans les appareils similaires, ce qui entraîne une réduction des coûts de fonctionnement et une fiabilité incontestables.
L'annonce du Gamma 3 a été faite en 1951. En octobre 1951 une première version en sera démontrée sous le nom de Gamma 2. Le premier Gamma 3 de série sera  livré au Crédit Lyonnais de Saint-Etienne en mars 1953.

En 1951, CMB conclut avec BTM, l'ancien distributeur britannique de IBM et qui a rompu avec son fournisseur, un accord pour la vente de traductrices.

En 1954, la Compagnie introduit sur le Gamma 3 M, le  Programme Par Cartes (PPC). Par l'utilisation de sous-programmes, par cartes ou affichés, il peut-être considéré comme un premier type de  logiciel . Il permet l'utilisation de programmes utilisateurs de longueur illimitée. Les instructions sont perforées sur cartes, en code décimal codé binaire (48 instructions par carte). 
L'un des sous-programmes affiché permet les calculs en point décimal flottant. La notation comprend : mantisse = 9 caractères, exposant = 2 caractères, signe = 1 caractère. Dans la pratique le PPC n'a été utilisé que pour des calculs scientifiques.  

En 1956, Bull introduit l'extension tambour du Gamma 3. Dans le modèle AET (armoise extension tambour), le Gamma 3 est connecté à un "périphérique" d'entrées/sorties : Tabulatrice ou Unité de lecture Perforation (PRD ou ULP). 
Le système est initialisé par le Programme des Ordres Initiaux (P.O.I.) qui qui charge le logiciel depuis cartes ou tambour. Les instructions sont en décimal codé binaire. Ce matériel a été utilisé  pour le développement de l'AP1, puis AP2 (langage d'auto-programmation), qui peut-être considéré comme le premier compilateur développé par Bull. Équipé d'un programme de mise au point en pas à pas (le premier logiciel "Utilitaire"), et d'une bibliothèque de sous-programmes mathématiques c'était en fait le premier véritable ordinateur de Bull.
Il a été utilisé en interne pour la simulation du code de programmation "B" du Gamma 60, et aussi plus tard pour des recherches sur la reconnaissance de caractères (O.C.R.)

Fin 1956, Bull commence à commercialiser  l'"Ordonnateur" (Gamma 3 + AET, connecté à deux "périphériques" : Tabulatrice et Unité de Lecture Perforation). Le nom a été forgé en réponse à l'introduction du mot "ordinateur" promu par IBM France, et dont Bull redoutait la protection.

Le 26 juin 1956, le réseau commercial France est réorganisé: 
 - Le directeur commercial sera assisté de deux chefs de ventes : pour Paris, M. Baudoin,  pour la province, Paul GODELUCK. 
 - Il est créé des postes d'inspecteurs généraux (Jean Dupuis, Robert Geoffroy, Paul Tiger).
 - IL est créé un "bureau des méthodes commerciales" dont le chef est André Cayla (placé sous l'autorité de Jacques Pépin de Bonnerive)

Le 16 juillet 1956 est créé un services Enquêtes économiques et études de marché, rattaché à la direction commerciale France sous la responsabilité de  René Bruel. Son champ d'investigations couvre la France et l'étranger.

En octobre 1956, à l'occasion du SICOB, aux Journées commerciales réunissant à Paris les membres des services commerciaux France et Exportation, est annoncé au réseau le projet d'un grand ensemble électronique qui sera dit "Gamma 60" (20 fois plus puissant que le Gamma 3), et qui constituera le haut de la gamme de Bull. Le 19 décembre 1956, la Compagnie fait don d'un Gamma 3 à la Faculté des sciences de Paris. Le jour de l'inauguration, elle annonce pour la première fois en public le futur lancement du Gamma 60. Cette annonce est suivie rapidement par une conférence sur le sujet faite aux ingénieurs SNCF, puis devant des congressistes du CAPA. On doit considérer cette annonce comme largement prématurée, compte tenu de l'état du projet aux Études.
En avril 1956, des journées d'étude Gamma 60, destinées aux prospects et clients, ont lieu salle de la Rochefoucauld à Paris. Courant 1957, deux Gamma 60 ont été commandés : 
- En achat, Assurances Générales sur la vie. 
- En location, EDF. 

En 1957, après l'autorisation donnée par le Directeur des Industries Mécaniques et Electriques "Les machines à statistiques de type commercial, comportant le cas échéant des dispositifs calculateurs n'étant pas susceptibles d'effectuer plus de 50.000 calculs par seconde, ne figurent pas sur les listes de produits prohibés à destination des pays de l'Est", Bull livre à l'Union Soviétique 1 Gamma 3 et 14 équipements mécanographiques dont 3 P80, 3 POR, 3 Peler, 21 Pelerod MC, 7 Vin, 14 Vinod, 12 Trieuses, 5 Traductrices, 4 Interclasseuses, 8 Calculatrices , 12 Poinçonneuses connectées, 14 Tabulatrices BS, 1 Gamma, pour une valeur de F. 430.249.530.