CONVENTION PLAN CALCUL

13 AVRIL 1967

CONVENTION

entre l'État et les Sociétés : Compagnie Générale d'Electricité, CSF - Compagnie générale de télégraphie Sans Fil -, Schneider S.A., Compagnie pour l'Informatique et les Techniques Electroniques de Contrôle, Intertechnique, Compagnie européenne d'Automatisme Electronique, Société d'Electronique et d'Automatisme, Compagnie Internationale pour l'Informatique.

Entre l'État représenté par :
- Le Ministre de l'Économie et des Finances ;
- Le Ministre d'État chargé de la Recherche Scientifique et des Questions Atomiques et Spatiales ;
- Le Ministre des Armées ;
- Le Ministre de l'Industrie ;

Et les sociétés :
- Compagnie Générale d'Électricité représentée par
Monsieur Ambroise Roux, Administrateur Directeur Général ;
- CSF - Compagnie générale de télégraphie Sans Fil représentée par
Monsieur Maurice Ponte, Président Directeur Général ;
- Schneider S.A. représentée par
Monsieur Roger Gaspard, Président Directeur Général ;
- Compagnie pour l'Informatique et les Techniques Électroniques de Contrôle représentée par Monsieur Robert Rémillon, Président Directeur Général ;
- Intertechnique représenté par
Monsieur Jacques Maillet, Président Directeur Général ;
- Compagnie européenne d'Automatisme Électronique représentée par
Monsieur Robert Rémillon, Président Directeur Général ;
- Société d'Electronique et d'Automatisme représentée par
Monsieur Guy Renaudin, Président Directeur Général ;
- Compagnie Internationale pour l'Informatique représentée par
Monsieur Jacques Maillet, Président Directeur Général ;

Il est convenu ce qui suit :

PRÉAMBULE


  La loi du 30 Novembre 1965 portant approbation du Plan de Développement Économique et Social met l'accent dans son introduction sur le rôle décisif que joueront dans la croissance future de notre pays les équipements de traitement de l'information.
" L'avènement des équipements électroniques pour la direction et la gestion des entreprises publiques et privées, leur utilisation pour toutes les formes de la recherche scientifique et technique, aussi bien que leur mise en œuvre dans les applications industrielles et militaires, ont ouvert des possibilités immenses de perfectionnement, de souplesse, d'efficacité et d'économie. A tel point que la maîtrise de ces équipements organisés en réseaux sur l'ensemble d'un pays peut être désormais considérée comme une des clefs du développement de ce pays dans toutes ses activités. "
  Il en résulte pour la France la nécessité absolue d'avoir dans un délai rapproché une industrie nationale du calcul, si elle veut demeurer maîtresse de son destin.
A ce jour, l'industrie étrangère du calcul, favorisée à la fois par la dimension de ses entreprises et par d'énormes programmes publics, a pris une position prédominante sur le marché mondial. Disposant d'un triple atout : avance technique considérable, réseau commercial présent partout et moyens financiers très puissants, elle paraît en mesure d'empêcher toute tentative de création d'une industrie concurrente par des entreprises livrées à leurs seules forces. La concurrence est rendue encore plus difficile par la pratique systématique d'une politique de location ayant atteint un régime stable de haute rentabilité.
  Il est donc nécessaire que l'État apporte son aide pendant toute la période de démarrage aux entreprises françaises qui, bien que ne disposant pas encore des moyens et de la dimension industrielle leur permettant de se développer au rythme voulu, ont déjà obtenu des résultats prometteurs dans ce domaine et paraissent capables de devenir la base d'une future industrie française de l'Informatique.
  Cette aide doit revêtir une triple forme : appui technique, aide financière, facilités de débouchés.
  L'appui technique est indispensable parce que la contribution de l'État à la recherche et à la formation des hommes est une condition impérieuse de réussite des entreprises concernées.
  Une aide financière exceptionnelle de l'État est nécessaire pour a11éger pendant la période de croissance initiale des entreprises les charges particulièrement lourdes des investissements en personnel et en biens matériels que celles-ci ne pourraient prélever sur leurs ressources propres avant d'avoir atteint la masse critique.
  Enfin, l'État, qui contrôle une part importante du marché français, doit assurer à cette industrie, fragile et exposée à une concurrence brutale et étendue, un développement prioritaire sur une longue période en facilitant le débouché de ses produits.
  Pour être efficaces, ces aides doivent se concentrer sur un petit nombre d'entreprises à vocation déterminée, et en ce qui concerne les ordinateurs, sur une seule Entreprise.
L'objectif de l'effort engagé en commun est de permettre à cette Entreprise d'atteindre à l'expiration de l'année 1971 un volume d'activité, une rentabilité et un potentiel technique tels qu'elle puisse tenir sa place sur le marché intérieur et extérieur en se passant de l'aide exceptionnelle que justifient les difficultés de démarrage. Elle devra alors être capable par la qualité et le prix de ses produits de répondre à la majeure partie des problèmes qui lui seront posés et par le niveau élevé de son potentiel scientifique, technique et commercial d'être maîtresse de sa stratégie.
  Cependant, en raison de l'ampleur de l'opération engagée et de l'importance croissante du domaine de l'Informatique, les deux parties considèrent qu'il est normal que la collaboration instituée entre elles soit sur des bases nouvelles au-delà de la durée de la présente Convention.
L'Entreprise devra lancer tout d'abord un programme limité dans ses ambitions, la gamme des ordinateurs développés dans une première étape ne pouvant couvrir la totalité du marché.
  En particulier, elle ne pourra s'engager au départ dans le marché des petits ordinateurs de bureau ou de gestion qui nécessitent, pour autoriser une fabrication en grande série, seule susceptible de mener à des prix compétitifs, un réseau commercial très étendu restant à créer.
Elle ne s'engagera qu'ultérieurement dans le développement d'un très grand ordinateur exigeant un potentiel technique spécialisé dont elle ne dispose pas à l'heure actuelle. La recherche d'État fournira à l'Entreprise une aide initiale pour déterminer diverses orientations techniques possibles et en lui permettant la formation progressive des équipes nécessaires.
  Les efforts de l'Entreprise doivent donc être concentrés au départ sur une gamme moyenne. Cette dernière permettra la pénétration progressive mais vigoureuse des secteurs du marché : application scientifique et de contrôle industriel, applications de gestion, applications militaires. Un effort privilégié devra être consacré au domaine de la gestion qui offrira les plus larges débouchés tant que les matériels resteront spécialisés.
  L'Entreprise devra étudier le marché possible d'une famille de calculateurs analogiques dont certains pourraient être couplés à la fois à certains ordinateurs fabriqués par la Compagnie et ultérieurement aux ordinateurs de la gamme développée au titre de la Convention.
  Des études approfondies permettront de dégager l'importance de l'effort à faire sur cette famille.
L'Entreprise devra par ailleurs fournir, en étroite collaboration avec la recherche d'État et les autres laboratoires de l'industrie, un important effort de recherche et d'étude afin de préparer les bases d'une politique technique cohérente et indépendante à moyen et long terme. Celle-ci devra en particulier mener à la définition des ordinateurs de la génération suivante et donner à l'Entreprise les moyens de rester maîtresse de sa politique industrielle en cas d'évolution fondamentale des structures et des technologies des systèmes de traitement de l'information
  L'harmonisation des produits principaux qui composent un système de traitement de l'information, et par conséquent la cohérence entre tous efforts de toutes les entreprises françaises concourant au développement de l'informatique, sont des conditions nécessaires de la réussite.
A ce titre, l'Entreprise participera étroitement à la définition de ceux des matériels périphériques dont le développement sera confié à d'autres entreprises et assurera une étroite coordination de ses efforts avec ceux entrepris par l'industrie nationale des composants.
  La décision de l'État d'accorder son aide à l'Industrie de l'Informatique se traduit par un ensemble d'engagements qui constituent une opération indissociable et irréversible, autant pour l'État que pour les industriels.
  La mobilité exceptionnelle d'un marché particulièrement concurrentiel en pleine évolution technique pourra rendre cependant nécessaire l'examen périodique des modalités de l'opération afin de s'assurer de leur meilleure adaptation aux objectifs fixés.
  La présente Convention organise la coopération entre l'État et l'Entreprise de telle sorte que la collectivité nationale participe avec cette dernière de manière équitable et efficace à la fois aux risques et aux avantages de l'opération commune.
Le texte de Convention qui suit a pour objet :
- de préciser les objectifs des actions de l'État et de 1'Entreprise et leurs engagements respectifs,
- de fixer les modalités et procédures d'exécution.

Cette Convention est strictement confidentielle et à ce titre ne devra être communiquée qu'aux agents des parties signataires ayant à en connaître dans l'exercice de leurs responsabilités.

CHAPITRE I

ENGAGEMENTS DES PARTIES

I.A ENGAGEMENT DE LA C.I.I. ET DE SES Sociétés-MÈRES

I.A.1 - Engagements généraux

Article 1er

Pour atteindre les objectifs généraux fixés dans le préambule :

1 ° Les Sociétés :
     - Compagnie Générale d'Électricité,
     - C S. F. - Compagnie Générale de Télégraphie Sans Fil,
     - SCHNEIDER S.A.,
les deux premières agissant par le canal de la Compagnie pour l'Informatique et les Techniques Électroniques de Contrôle (CITEC), elle-même associée aux Sociétés Intertechnique et Mines de Kali Sainte Thérèse,
ont décidé de regrouper dans le domaine des systèmes de calcul les moyens de leurs filiales :
    - la Compagnie européenne d'Automatisme Électronique (C.A.E.)
    - et la Société d'Électronique et d'Automatisme (S.E.A.)
au sein de la COMPAGNIE INTERNATIONALE POUR L'INFORMATIQUE (C.I.I.).

2 ° La C.I.I. entreprendra toutes études et tous travaux nécessaires.

3 ° L'État ayant pris acte de cette décision et constatant que le contrôle de la nouvelle société est assuré par des capitaux français, a décidé, sous réserve que soient remplies les conditions prévues aux articles 3 à 12 ci-après, d'apporter son aide à la Compagnie Internationale pour l'Informatique.

Article 2

La C.I.I. se donnera les moyens d'atteindre les objectifs de la présente Convention. A cet égard :

1 ° Elle développera ou mettra en place progressivement les moyens en personnel nécessaires à la réalisation du programme technique défini à l'article 10 ci-après, ces moyens comprenant notamment :
   - des équipes d'études de conception des machines et des systèmes ainsi que des moyens de programmation,
   - des équipes de recherche,
   - des réseaux commerciaux et spécialement des équipes technico-commerciales chargées de l'étude des problèmes de la clientèle,
   - des centres de démonstration,
   - les équipes d'instructeurs nécessaires à la formation du personnel des utilisateurs,
   - les spécialistes de la mise en service et de la maintenance des machines.

2 ° Compte tenu du rythme de croissance très rapide que nécessitera l'exécution du programme prévu, la C.I.I. attachera une importance toute particulière aux problèmes posés par le recrutement, l'encadrement et la gestion du personnel. La politique de recrutement sera conduite de manière à donner la priorité à la qualité de l'encadrement et des spécialistes de tous niveaux.
La Compagnie prendra toutes mesures pour s'assurer le concours de cadres scientifiques de très haute qualification et le conseil de personnalités industrielles ou universitaires choisies pour leur compétence.

3 ° La C.I.I. investira les sommes nécessaires pour pouvoir disposer de moyens de production adaptés à l'exécution du programme technique défini à l'article 10 ci-après, et notamment :
   - d'immeubles à usage industriel et commercial,
   - de moyens industriels de calcul et de simulation nécessaires la mise au point des matériels à lancer,
   - de moyens de fabrication et de contrôle,
   - des matériels de démonstration nécessaires au succès commercial tant en France que dans les pays étrangers.
Le montant estimé de ces investissements est précisé à titre indicatif dans le Plan de Financement figurant en annexe 1.

Article 3

Eu égard aux objectifs de la présente Convention, la C.I.I. s'attachera :
   - à réviser progressivement les accords qui la lient à des sociétés étrangères en vue en vue d'obtenir sa liberté d'action sur le plan technique, industriel et commercial,
   - à établir des liens, et le cas échéant, des accords contractuels, de nature technique, industrielle, commerciale, avec les entreprises françaises capables de concourir harmonieusement à un développement cohérent de l'industrie française de l'Informatique.

Les dispositions ci-dessus ne font pas obstacle aux possibilités de collaboration internationale qui viendraient à s'offrir à la Compagnie Internationale pour l'Informatique et qui auraient pour effet de renforcer sa capacité industrielle ou commerciale sans entraîner de modification des objectifs de la présente Convention.

Article 4

La C.I.I. détient l'ensemble des connaissances techniques en matière d'informatique acquises antérieurement par S.E.A. et C.A.E.
Les Sociétés S.E.A. et C.A.E. font apport à la C.I.I. de tous les brevets et droits de propriété industrielle en matière d'informatique dont elles disposaient au 1er janvier 1967.

Article 5

Les Sociétés-mères renoncent à exercer, par elles-mêmes ou par d'autres entreprises de leurs groupes, des activités de même nature que celles qui seront confiées à la Compagnie Internationale pour l'Informatique.

Article 6

Les actions de la C.I.I. ont la forme nominative. Toute cession a une personne non encore actionnaire doit pour devenir définitive être agréée suivant les modalités définies à l'article 11 des statuts de la C.I.I. Tout aménagement de ces modalités doit être soumis à l'accord préalable du Délégué à l'Informatique.

Article 7

Les dispositions de la présente Convention seraient de plein droit soumises à un nouvel examen dans le cas d'une cession d'actions à une personne non encore actionnaire sans que la Compagnie ait obtenu l'accord préalable du Délégué 'à l'Informatique.

Article 8

Les dispositions des articles 6 et 7 feraient l'objet d'une révision dans le cas d'une introduction en Bourse des actions de la Compagnie.

 

1.A.2 - Programme technique

Article 9

La Compagnie s'engage à développer une activité nouvelle en deux étapes concrétisées par la commercialisation d'une première gamme de systèmes de calcul électronique dite Gamme I et la préparation d'une deuxième Gamme dite Gamme II.
Elle s'engage en particulier à mettre sur pied un potentiel de recherche et d'études susceptible de constituer les bases de la spécification du matériel de la Gamme II.
Ce programme dont les articles 10 à 14 ci-après définissent les objectifs principaux, est précisé dans un document particulier qui fait l'objet d'un accord séparé entre le Délégué à l'Informatique et la C.I.I.

Article 10

Le programme technique de la Compagnie se décompose comme suit :
  - développement d'une famille de quatre ordinateurs dits Gamme 1 destinés à être produits industriellement à partir de 1969 ;
  - définition en liaison avec les fabricants de ces produits, d'une part des composants, d'autres part de certains des matériels périphériques nécessaires la réalisation de ces ordinateurs ;
  - réalisation en version militaire de deux des machines de la Gamme I.

Article 11

La Gamme I comporte quatre systèmes de puissances échelonnées PO, P1, P2, P3.

   P0, Pl, P2, sont trois systèmes compatibles ayant des structures semblables et un mode de fonctionnement commun.
    Pl, base de cette série, est un système moyen universel, adapté aux applications en temps réel et scientifiques, et tout particulièrement à la gestion.
    P0 est une version allégée adaptée particulièrement aux applications industrielles en temps réel et aux petits centres de calcul scientifique.
    P2 est un système universel puissant destiné à toutes les catégories d'applications et couvrant grâce à des dispositifs optionnels une large plage de performances.

  P3 est un système de grande puissance compatible avec le système 10 070 commercialisé par la Compagnie, dont il prolonge vers le haut les applications dans le domaine scientifique et du temps réel.

Les caractéristiques de base des différents systèmes et le calendrier de leur réalisation font l'objet d'un accord séparé.
Les dates de ce calendrier sont considérées comme des objectifs définitifs sauf modifications concertées du programme technique industriel et commercial au cours de sa réalisation.

Article 12

L'action de recherches et de préparation de la Gamme II comprend les études et recherche, portant sur les structures des unités centrales et systèmes d'informatique, sur les technologies des circuits logiques et des mémoires, sur les langages et la programmation. Son but est de :
   - fournir les éléments nécessaires pour permettre les choix techniques et économiques qui conditionnent l'élaboration de la politique de la Gamme II.
   - procurer à la C.I.I. les compétences et les moyens nécessaires pour garder le contrôle de sa politique industrielle dans l'hypothèse probable d'une évolution fondamentale des structures et technologies des systèmes de traitement de l'information.
   - préparer la C.I.I. à une extension de la Gamme I vers des machines de plus grande puissance.

Article 13

Au titre de son action dans le domaine des périphériques, la C.I.I. devra :
   - disposer de la compétence nécessaire pour définir une politique de produits périphériques et proposer un plan d'action détaillé au Délégué à l'Informatique.
   - mettre en place les moyens nécessaires d'une coordination permettant l'intégration de ces matériels périphériques dans les systèmes proposés par la C.I.I.
   - poursuivre le développement de certains périphériques.
   - accomplir et faire accomplir en France dans ce domaine des progrès significatifs dont l'influence sur les conceptions de la Gamme II sera déterminante.

Article 14

Dans le domaine des composants, la C.I.I. devra assurer une étroite coordination de ses programmes de recherche et de développement avec ceux de l'industrie nationale des composants, coordination nécessaire pour garantir des politiques techniques et industrielles de produits, cohérentes et compatibles entre elles.

Article 15

Les sociétés actionnaires de la C.I.I. s'engagent à lui apporter, dans les délais les plus brefs compatibles avec l'accomplissement des opérations matérielles et juridiques nécessaires, la totalité des actifs de la C.A.E. et de la S.E.A., à l'exception des éléments d'actif corporels et incorporels n'intéressant pas les systèmes de calcul.
Des mesures intérimaires seront prises de façon à permettre le fonctionnement de l'ensemble apporté à la C.I.I. dans les mêmes conditions que si les apports étaient réalisés.

Article 16

Les sociétés actionnaires de la C.I.I. s'engagent à augmenter le capital de cette dernière par versements en numéraire entièrement libérés dont le montant global atteindra 66 Millions de Francs au 31 décembre 1971 (soit 12 Millions en 1967, 12 Millions en 1968, 12 Millions en 1969, 15 Millions en 1970 et 15 Millions en 1971).
Elles consentiront en outre à la C.I.I. un prêt à long terme d'une durée au moins égale à 15 ans et d'un montant global de 12 Millions de Francs répartis par parts égales sur les 4 années 1967 à 1970. Ce prêt ne donnera pas lieu à remboursement avant 1972.

Article 17

Les sociétés actionnaires de la C.I.I. s'engagent à lui apporter leur appui, sous la forme qu'elles jugeront appropriée, afin de l'aider à obtenir les crédits ou à contracter les emprunts nécessaires au financement de ses investissements et de ses fabrications.

I.B ENGAGEMENT DE L'ÉTAT

I.B.1 - Engagements généraux

Article 18

L'État accordera sa préférence, lors de l'étude et de la mise en œuvre des projets d'équipement des services, établissements, entreprises et collectivités relevant de son autorité ou de son pouvoir de tutelle, aux matériels produits et aux systèmes réalisés par la C.I.I. dans toute la mesure compatible avec la respect des règles normales de la concurrence et des textes législatifs et règlements applicables en la matière. Il donnera notamment à la C.I.I. ou à ses représentants toutes facilités pour participer dès leur origine aux études entreprises par les utilisateurs publics ou parapublics d'ordinateurs.
Il encouragera toute forme de collaboration entre la C.I.I. et les utilisateurs précités permettant une complète compréhension des problèmes à résoudre.
Afin de faciliter l'établissement du programme industriel de la Compagnie et lui permettre d'atteindre ainsi à une meilleure productivité, l'État lui communiquera les plans d'équipement à moyen ou long terme qui seront établis pour les services, établissements, entreprises et collectivités relevant de son autorité ou de son pouvoir de tutelle.

Article 19

Eu égard à l'incidence sur les besoins de financement de la Compagnie définis en Annexe 1, de la part respective des ventes et des locations, l'État s'efforcera de favoriser l'acquisition des matériels produits par la C.I.I. de préférence à la location lorsqu'ils seront destinés aux services, établissements, entreprises et collectivités relevant de son autorité ou de son pouvoir de tutelle.

Article 20

L'État entreprendra un effort important de formation d'ingénieurs et de techniciens de l'Informatique et consultera notamment la Compagnie sur les besoins à satisfaire dans ce domaine.

I.B.2 - Engagements financiers

Article 21

La Compagnie bénéficiera pour la réalisation du programme technique défini aux articles 9 à 14 de marché d'études et de recherche dans les limites des montants figurant dans l'échéancier prévisionnel ci-dessous et des crédits budgétaires qui seront ouverts à cet effet par les lois de finances annuelles et que le Gouvernement s'engage à inscrire dans les projets de budget qui seront soumis au Parlement.

 

En Millions de Francs

1967

1968

1969

1970

1971

TOTAL

Systèmes Gamme I

64

66

67,8

22,6

 

220,4

Recherche & Préparation Gamme II

6

12

12

48,2

75,8

154

TOTAL

70

78

79,8

70,8

75,8

374,4

Définition des composants et de certains Périphériques en liaison avec des fournisseurs extérieurs

 

3,8

 

4,2

 

4,2

 

4,2

 

4,2

 

20,6

GRAND TOTAL

88,8

100,2

102

84

84,5

459,5

 

Le montant ci-dessus de 459,5 Millions de Francs correspond à un montant hors taxes de 379 Millions de Francs.

Article 22

Pour le financement des investissements prévus au plan annexé, l'État accordera à la Compagnie Internationale pour l'Informatique un prêt du FDES d'une durée de 15 ans, d'un montant global de 40 Mi11ions de Francs, à raison de 20 Millions de Francs en 1967, 10 Millions en 1968 et 10 Millions en 1970.
Le taux de ce prêt est fixé à 6,5 % pour la tranche 1967 ; il sera fixé par analogie pour les tranches suivantes.

Article 23

En outre, l'État contribuera au développement et à la réalisation en série des matériels étudiés dans le cadre de la présente Convention en accordant à la Compagnie au cours de la période 1967 - 1971 une aide au développement remboursable en cas de succès d'un montant de 40 Millions de Francs dans la limité de 50 % des dépenses de recherches et de développement qu'exécutera la société sans être couverte par des marchés de l'État.

Article 24

En vue de couvrir le risque technique afférent aux nouveaux types de matériels élaborés et fabriqués par la Compagnie Internationale pour l'Informatique, à l'exclusion des matériels militarisés, en application de la présente Convention, l'État est disposé à accorder sa garantie dans le cadre d'une lettre d'agrément aux crédits que contractera la Compagnie pendant la période 1967 - 1971 pour contribuer au financement :
  - de la location de ces matériels,
  - de leur fabrication.
Pour les financements afférents au matériel en location, la garantie de l'État cessera d'avoir effet si dans un délai de six mois à compter de la réception définitive, la clientèle n'a pas retourné le matériel à la société ou interrompu le versement des redevances de location pour des motifs tenant à une déficience technique des systèmes.
L'encours maximum des crédits pouvant bénéficier de la garantie de l'État est fixé à 130 Millions de Francs.
Les marchés de location passés par les services de l'État pour les, matériels visés au présent article prévoiront en règle générale une durée de location d'au moins 30 mois à compter de la réception définitive.

Article 25

La Compagnie Internationale pour l'Informatique bénéficiera d'une lettre d'agrément pour le financement des matériels appartenant aux gammes CAE et SEA qu'elle fabriquera et louera dans le cadre de marchés susceptibles de donner lieu à nantissement en application du Décret du 30 octobre 1935.
Pour faciliter le financement dudit matériel, les marchés de location passés par les services de l'État prévoiront une durée de location d'au moins 30 mois à compter de la réception définitive.
En outre, les clauses de ces marchés relatives aux conditions de résiliation par l'Administration seront aménagées de manière à renforcer la valeur de la sûreté constituée par le nantissement des marchés de location.
Le Délégué à l'Informatique s'efforcera de faire insérer des dispositions analogues dans les marchés de location qui seront passés avec la Compagnie Internationale pour l'Informatique par les entreprises nationales et les Etablissements Publics.


CHAPITRE II

MESURES D'EXÉCUTION

II.A INSTRUCTION ET PASSATION DES MARCHÉS

Article 26

Les programmes d'études, de recherche et de réalisation de prototypes appelés à faire l'objet de marchés sont proposés par la Compagnie au Délégué à l'Informatique. Celui-ci fournira au contractant les informations, spécifications et plus généralement tous éléments en sa possession relatifs aux études ou aux réalisations faisant l'objet des différents programmes.
Les marchés seront signés par le Premier Ministre ou son délégué qui pourra associer tout organisme ou personne mandatés par lui à leur préparation matérielle, à la surveillance de leur exécution et à leur liquidation.
Par dérogation aux dispositions ci-dessus, les marchés relatifs aux calculateurs version militaire de Po et P2 seront préparés, notifiés, contrôlés et liquidés par les services compétents des Armées, conformément aux règles qui leur sont propres.

II.B INTERVENTION DU DÉLÉGUÉ A L'INFORMATIQUE

Article 27

Indépendamment des contrôles liés aux modalités particulières de l'aide dont l'État fera bénéficier l'Entreprise, celle-ci adressera au Délégué à l'Informatique, à la fin de chaque semestre, un compte rendu sur l'état d'avancement du programme faisant l'objet de la présente Convention. Ce compte rendu comprendra également un exposé de la situation d'ensemble de la Compagnie, notamment en ce qui concerne l'évolution de son chiffre d'affaires, ses perspectives commerciales et l'évolution de ses effectifs et de ses investissements, ainsi que le bilan et le compte d'exploitation de la société.
En outre, la C.I.I. fournira au Délégué à l'Informatique, sur sa demande, tous renseignements sur l'exécution d'un point particulier du programme, l'avancement de certaines études et leurs conclusions provisoires.

Article 28

La Compagnie recueillera l'accord du Délégué à l'Informatique, sur sa politique d'entente commerciale et technique avec les sociétés ou filiales françaises de sociétés étrangères.
Les accords de licence de brevets ou de savoir-faire conclus avec l'étranger concernant des produits de même nature que ceux visés aux articles 10 à 14 sont soumis à l'accord préalable du Délégué à l'Informatique.

Article 29

La Compagnie recueillera l'accord du Délégué à l'Informatique sur sa politique d'approvisionnement en composants et matériels périphériques pour les produits développés dans le cadre de la présente Convention.
L'intervention du Délégué, dont le but est d'assurer l'utilisation aussi complète que possible des ressources nationales, s'exercera avec le souci de sauvegarder le caractère concurrentiel des produits de la Compagnie.

Article 30

La Compagnie recueillera l'accord du Délégué à l'Informatique sur une liste de sous-traitants possibles pour les recherches et les études de développement ou d'exécution qui lui seront confiées et informera le Délégué à l'Informatique des contrats de sous-traitance, assistance ou collaboration passés à ce titre.

Article 31

Le Délégué à l'Informatique fera bénéficier la C.I.I. en priorité de toutes les informations dont il pourra disposer concernant l'évolution technique, commerciale et industrielle du marché de l'informatique.
Il informera en particulier dans la plus large mesure possible la C.I.I. de tous les résultats de la recherche d'État et des marchés d'étude et de recherche passés par l'État à d'autres industriels dans le domaine d'application de la présente Convention.
La Compagnie Internationale pour l'Informatique bénéficiera en outre d'un droit de préemption sur l'acquisition ou l'utilisation de tous brevets détenus par des organismes d'État dans le domaine de la présente Convention.
Il informera également la C.I.I. de toutes possibilités d'exportation ou de collaboration internationale dont l'État aurait connaissance ou qu'il envisagerait de promouvoir, et fera participer la Compagnie dans la plus large mesure possible à d'éventuelles négociations dans ce domaine.

Article 32

D'une manière générale, le Délégué à l'Informatique sera saisi des problèmes que soulèverait l'application de la présente Convention et notamment celle des dispositions des articles 18, 20 et 25.

II.C DROITS DE PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE - LICENCES ET BREVETS

Article 33

Les marchés d'étude et de recherche passées par l'État à la C.I.I. en application de la présente Convention seront sanctionnés par la remise au Délégué à l'Informatique des liasses, plans et autres descriptions de procédés relatifs aux travaux financés dans le cadre de ces marchés.
L'État renonce par contre à faire jouer, dans ces marchés, les clauses qui lui permettraient éventuellement de revendiquer tout ou partie de la propriété industrielle des études correspondantes et de leurs résultats.
Les brevets seront donc pris au nom de la C.I.I. qui en sera propriétaire ainsi que de l'ensemble des procédés scientifiques et techniques mis au point à l'occasion de la conception des matériels, de leur fabrication ou de leur utilisation, même s'ils ont leur origine en tout ou partie dans les études financées sur marchés publics. Toutefois, dans ce dernier cas, le Délégué à l'Informatique pourra demander à la C.I.I. de consentir à l'utilisation gratuite de certains des brevets résultant des marchés d'études prévus à l'article 21 par des services, établissements ou entreprises français, publics ou privés.
Cette clause ne pourra néanmoins pas s'appliquer, sans accord de la C.I.I., à la concession de licence de production de matériels complets développés par elle en application de la présente Convention.

Article 34

La vente de brevets ou la concession de licence autres que de vente par la C.I.I. à toute société non contrôlée par elle entraînera le versement à l'État d'une redevance de 30 % du produit net de ces ventes ou cessions, lorsque les dits brevets ou licences trouveront leur origine dans les marchés d'études conclus en application de l'article 21 précité.
Il sera tenu compte de cette redevance pour le calcul des sommes dont la société sera redevable envers l'État au titre du remboursement de la subvention prévue à l'article 23.

II.D CONTREPARTIE FINANCIÈRE DES CONCOURS EXCEPTI0NNELS DE L'ÉTAT

Article 35

Indépendamment des règles habituelles, applicables en matière de subventions remboursables en cas de succès, la C.I.I. versera à l'État en contrepartie des concours apportés sous forme de marchés d'études et de recherche une redevance annuelle calculée sur le chiffre d'affaires hors taxes de l'exercice.
Cette redevance sera égale à 1,5 % de ce chiffre d'affaires pour chacun des exercices 1969 à 1981 inclus.
Jusqu'à remboursement complet de l'aide au développement prévue à l'article 23, le chiffre d'affaires sur lequel est calculée la redevance ci-dessus n'inclura pas celui servant d'assiette au remboursement de cette aide.
Toutefois, la redevance ne sera due pour les exercices 1969 à 971 que dans la limite de la moitié des bénéfices distribués.
En tout état de cause, la redevance ne cessera d'être versée à l'État lorsque le total des versements aura atteint 40 % des fonds versés au titre des marchés d'études et de recherche (montant hors taxe).

II.E DURÉE DE LA CONVENTION

Article 36

La présente Convention prend effet à partir du 1er janvier 1967 pour une durée de 5 ans.

Article 37

Le Délégué à l'Informatique s'assurera que la politique menée par la C.I.I. est conforme aux objectifs définis dans le préambule. Il recherchera avec la Compagnie Internationale pour l'Informatique les conditions d'un nouvel accord, pouvant comporter révision des engagements réciproques des parties, si pour une raison quelconque l'une d'elles juge devoir s'écarter sensiblement de la ligne fixée par la présente Convention.

Article 38

Avant le 31 décembre 1968, les parties procéderont à un examen d'ensemble des résultats obtenus par la C.I.I. et de ses perspectives.
Un tel examen pourrait en outre être demandé par l'une ou l'autre des parties à tout moment au cours de l'exécution de la Convention au cas où la situation constatée montrerait l'impossibilité d'atteindre les objectifs fixés, avec les moyens prévus.
Tel pourrait être notamment le cas si, sans que ce soit du fait de la Compagnie, le volume des commandes de l'État portant sur les modèles de systèmes cités à l'article 11 et leur répartition entre ventes et locations s'écartaient sensiblement des prévisions suivant lesquelles a été établi le plan de financement figurant en annexe I et s'il en résultait un déséquilibre grave et durable de la situation financière de la Compagnie.
Cet examen aura pour but de vérifier, à la lumière de l'évolution de la Compagnie et du marché, que l'ensemble des opérations effectuées en application de la présente Convention est restée adapté aux objectifs généraux fixés.
Il pourrait conduire, si tel n'était pas le cas, à réviser d'un commun accord les dispositions de la Convention et notamment du programme technique et des engagements financiers.
Si en particulier cet examen faisait apparaître l'impossibilité d'atteindre les objectifs généraux sans mettre en œuvre des moyens financiers très supérieurs à ceux prévus au plan de financement ci-annexé, les deux parties se concerteraient en vue de déterminer s'il y a lieu de poursuivre la réalisation du programme ou d'en établir un nouveau ; au cas où une seule des parties souhaiterait que soit poursuivie l'exécution de tout ou partie du programme, il pourrait en résulter une nouvelle répartition des charges et des responsabilités.

Article 39

La Convention pourra être résiliée par l'une ou l'autre des parties sous réserve de l'observation d'un préavis d'un an.
Dans le cas où l'initiative de cette résiliation serait prise par l'État, sans être motivée par un manquement grave de la Compagnie Internationale pour l'Informatique ou de ses sociétés mères aux obligations découlant de la Convention ou par la constatation de l'incapacité de l'Entreprise à réaliser le programme technique cité plus haut, l'État verserait à la Compagnie Internationale pour l'Informatique une indemnité s'ajoutant aux sommes dues par lui au titre des marchés en cours.
Cette indemnité correspondrait à la fraction du coût des installations, du matériel, des outillages et frais spéciaux, supportés par la société en vue de l'exécution de la Convention et dont l'amortissement se trouverait compromis, aux indemnités de préavis et de licenciement résultant de cette résiliation ainsi qu'aux frais divers entraînés pour la Compagnie par les cessations d'activité en résultant directement.
Ces évaluations seraient déterminées à dire d'expert désigné d'un commun accord par les parties.

Article 40

La Convention serait réputée résiliée du fait de l'État si, sauf pour des raisons imputables à la société, le volume des marchés d'études et de recherches était sensiblement inférieur au montant fixé à l'article 21.
De même, la Convention serait réputée résiliée du fait de la Compagnie Internationale pour l'Informatique si, sauf en conséquence directe d'une décision de l'État, le montant des augmentations de capital en espèces était sensiblement inférieur au montant fixé à l'article 16.

Article 41

Les engagements de l'État cesseraient d'avoir effet au cas où une société, étrangère acquerrait directement ou indirectement, sans l'accord de l'État, une participation au moins égale à 20 % du capital de la Compagnie Internationale pour l'Informatique et prendrait ainsi le contrôle de cette société.

Fait à Paris, le 13 avril 1967
En douze exemplaires originaux

Suivent les signatures :
- du Ministres de l'Économie et des Finances,
- du Ministre d'État chargé de la Recherche Scientifique et des Questions Atomiques et Spatiales,
- du Ministre des Armées,
- du Ministre de l'Industrie,
- d'Ambroise Roux pour CGE
- de Maurice Ponte pour CSF
- de Roger Gaspard pour Schneider SA
- de Robert Rémillon pour CITEC
- de Jacques Maillet pour Intertechnique
- de Robert Rémillon pour CAE
- de Guy Renaudin pour SEA
- de Jacques Maillet pour CII

En annexe sont donnés :
- le plan de financement,
- l'hypothèse de répartition entre ventes et location à l'intérieur du chiffre d'affaires pour les organismes publics et parapublics, ayant servi de base à l'établissement du plan de financement.