Histoire de la Compagnie des Machines Bull

1941-1947

Le 28 juin 1940, le Major Passow du Militärbefeshaber in Frankreich rend  visite au siège de la Compagnie pour évaluer l'importance stratégique des la Compagnie pour le Reich. Ses visites suivantes seront accompagnées par des dirigeants de la Wanderer Werke qui se par ailleurs s'est fait livrer des matériels saisis dans l'armée et les administrations françaises. C'est la Wanderer Werke qui se charge des relations ultérieures avec Bull.

Le 25 janvier 1941, au cours de la réunion du Conseil, Jacques Callies :
 - relate les conversations menées avec Herr Dr. Klee, directeur général de la Wanderer Werke de Chemnitz. Le conseil donne pouvoir à son président pour signer avec cette société tous accords relatifs à l'achat, la vente, l'échange de brevets, et tous accords commerciaux. La négociation engagée durera jusqu'à la fin 1942. L'accord se fera sur un échange de brevets, assorti d'un projet de fabrication sous licence à Chemnitz de matériels d'origine Bull avec une option de commercialisation en Allemagne et territoires assimilés. Bull conservant la France et la Belgique.
- Robert JOURDAIN est de nouveau accueilli comme administrateur (le nombre de ses mandats n'atteint plus le maximum prévu par la loi).
- Les jetons de présence de l'année 1940 sont mis en paiement. Les résultats de 1940 : Bénéfice d'exploitation : 7.261.807 francs. Bénéfice net : 1.175.607 francs. 

En janvier 1941 Un important marché de 36 millions de francs est signé avec le ministère des finances au titre du Service de la démographie fondé en décembre 1940 par le contrôleur général René Carmille pour réaliser un  système d'information statistique administratif, (SISA).
La banque de Paris et des Pays-Bas en avril 1941 accepte de concourir au financement des commandes issues du ministère des finances.

Le 17 mai 1941, au Conseil d'Administration de CMB:
- En raison de son âge et de son état de santé, Marcel Bassot quitte le Conseil d'administration dont il était vice-président depuis le 16 Avril 1932). 
- Jacques Callies et Georges Vieillard reçoivent pouvoir de négocier l'achat des locaux industriels jusque là en location, complétés par des terrains et bâtiments situés av. Gambetta (92, 92bis), impasse du Surmelin (25, 27), impasse du Progrès (19 bis). L'ensemble des bâtiments et terrains négociés (de forme irrégulière) représente une surface de 3.037,50 m². Le prix principal proposé est de 820.500 francs, dont 630.000 au comptant.

En 1941, Bull se fait condamner pour contrefaçon des brevets IBM en adoptant la carte perforée à 80 colonnes. L'appel suspensif interjeté ne sera jugé en faveur de Bull qu'en 1947, pour vice de forme, IBM ayant délivré des matériels 80 colonnes avant le dépôt du brevet en France.

Le 15 juillet 1941, en vue d'un recensement, chaque Français reçoit un numéro national d'identité.  Ce recensement a été organisé par René Carmille, utilisant les équipements mécanographiques Bull. Sous couvert de recenser Français de souche et étrangers vivant en France, Carmille préparait une remobilisation de la France. Il a su ne pas satisfaire les demandes du Commissariat aux Affaires Juives et des autorités d'occupation, mais finalement ses contacts avec la Résistance à l'occupant le mèneront au camp de déportation de Dachau où il mourra en janvier 1945.

Le 12 novembre 1942 au Conseil d'administration  de CMB:
 - Le président recommande d'augmenter le volume des locations de matériel par rapport aux ventes. 
- Le conseil décide d'émettre un emprunt obligataire d'un montant maximum de 30 millions de francs. Le montant de cet emprunt sera réduit à 20 milions de francs au conseil de février 1943. 
- Les propriétaires d'un terrain et de bâtiments mitoyens à l'usine ont fait une offre de vente à la Compagnie (21 impasse du Progrès - superficie 422 m2 - prix à payer comptant 160.000 francs). 

Le 27 mai 1943 Après examen du bilan au 31 décembre 1942, le conseil décide la distribution de 8 francs par action libérée et de 4 francs par action libérée de moitié.

Le 26 juin 1943 le Conseil décide l'acquisition : 
- d'un terrain sis 157 avenue Gambetta (590 m2, prix principal 472.000 francs, payable comptant) 
- d'un terrain et d'un pavillon sis 159 avenue Gambetta (1.000 m2 plus un pavillon à usage de bureaux et d'habitations, plus un atelier, au prix principal de 1.300.000 francs payable comptant).

Le 29 février 1944 le Conseil décide  d'acquérir un terrain et diverses constructions 25 et 27 rue du Surmelin (1.908 m2). Le prix d'acquisition de 900.000 francs est converti en rente viagère annuelle de 100.000 francs au profit de la propriétaire, Madame Munie.

En mars 1944 la Compagnie dépose une demande à la commission des prix une augmentation de 38% des tarifs.  Les négociations sont longues et difficiles (alors que l'augmentation des salaires majore de 14% les prix de revient et que nos concurrents étrangers importateurs enregistrent une hausse de 45% sur leurs tarifs de 1939).

Le 5 mai 1944 le Conseil d'administration note:
 - Le bénéfice de l'exercice 1943 (2.122.708 francs), augmenté d'un report à nouveau de 384.237 francs sera distribué, le dividende net restant le même que l'année précédente.
 - La Cour d'Appel a décidé d'appeler à l'audience l'affaire contre la société suisse Bull A.G.
 - Les restrictions d'électricité et les réquisitions de main-d'œuvre créent des difficultés de travail. On envisage la possibilité d'installer comme moyen de secours un moteur à gaz pauvre et un alternateur.

Le 16 août 1944, la production de l'usine est arrêtée.

Le 26 septembre 1944, Jacques Callies doit s'absenter de Paris en raison de son état de santé. Jusqu'au 1er mars 1945, c'est son frère Jean Callies qui assumera la direction de la société, tout en pouvant déléguer à Georges Vieillard ou à Joseph Callies.

Le 1 octobre 1944 l'usine de Gambetta reprend la production, grâce à l'installation de force motrice avec moteur à gaz pauvre réalisé en juin.

Le conseil d'administration constate le 20 octobre 1944:
 - Que le bénéfice brut est en diminution en raison de la décroissance de l'activité de l'usine, de l'augmentation des dépenses, et du retard apporté par la Commission des Prix au réajustement des tarifs.
 - Constate les pertes subies par la société à la suite des évènements de guerre :
 installation mécanographique du port de Brest détruite, 
SNS de Rennes détruite, 
SNS de Nancy réquisitionnée par les Allemands, 
port de Toulon sinistré à 50%.

Au cours du 4ème trimestre 1944, le conseil de préfecture condamne la compagnie à verser 5.083.579 francs au titre de la taxe à la production pour les années 1937 à 1944. 
La Compagnie dépose une demande auprès du Ministère des Finances et de l'Économie Nationale, en même temps qu'auprès des contributions directes pour que toute la question soit révisée. L' administration "semble devoir se montrer bienveillante". Le 7 janvier 1945, la compagnie est citée devant le Comité de confiscation des profits illicites. Elle lui remettra un dossier le 23 février 1945.
 

Fin 1944, les premières commandes d'après guerre sont enregistrées en provenance du Ministère de la guerre, de la Préfecture de Police, des assurances "Le Nord", et du Comptoir National d'Escompte.

Le dividende distribué (987.744,77 francs) sera de 8 francs par action libérée au 1er janvier 1944 et 6 francs par action libérée au 30 juin 1944.


Le 10 janvier 1945 Jacques Callies reprend ses fonctions de PDG

Le 5 juin 1945 Le Conseil d'Administration est informé:
 - Que le Directeur des Contributions directes a refusé la demande de la Compagnie d'être exceptée des sommes réclamées au titre de la taxe à la production.
 - Que les salaires du PDG, des cadres et employés sont augmentés. Le salaire du PDG n'ayant pas bougé depuis 1935, il est porté mensuellement de 4.000 frs (plus 8% du bénéfice net) à 30.000 frs (15.000 frs à titre d'appointements et 15.000 frs à titre de garantie minimale sur la partie proportionnelle calculée en fin d'exercice).

Le 05 novembre 1945 le Conseil d'administration constate : 
- Difficultés de paiement des factures relatives aux administrations publiques, qui ont annoncé que les mandatements seraient retardés de plusieurs mois. 
- Participation de 10% au capital de la S.A. en voie de constitution, sous le nom de "Société auxiliaire de statistiques, de classement et de totalisation". 
- Recherche d'un prêt à moyen terme (Sté UCINA) de 30 millions. Négociations en cours. 
- Décision d'une augmentation de capital de 5 millions (de 25 millions à 30 millions par émission de 20.000 actions de 250 francs. 
- Le dividende de l'année 1944 sera versé le 15 décembre 1945.

Fin 1945 De nouvelles références sont enregistrées : 
- Assurances "Le Phoenix vie". 
- Assurances de l'Ouest. 
- Société Lumière. 
- Banque Lafanechère à Grenoble.


1947 CMB est représentée au Danemark par un agent général : Koenig Petersen 

En juillet 1948 , la Société belge des Machines Bull cesse son activité commerciale aux Pays-Bas par suite de la naissance à Amsterdam de la société Bullatec (association de CMB et de Kamatec) chargée à la fois de la production des trieuses et de la commercialisation de l'ensemble des matériels de Bull. :
La décision est prise de construire à Amsterdam une usine spécialisée. En attendant Bullatec occupe les ateliers de Kamatec. En Avril 1949 le nouveau bâtiment est terminé. Il regroupe les services commerciaux et industriels. L'outillage de l'usine est particulièrement moderne.


 

 


Jacques Callies

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


René Carmille
photo www.site-marius-autran.com

Outre la documentation réunie dans les archives Bull par la Fédération des Équipes Bull, cette page utilise les présentations faites par Lars Heide et Paulette Richomme au colloque Histoire de l'Informatique de Toulouse. Cette page est encore incomplète, ignore les activités études pourtant importantes en 1941-1942 (introduction des machines de la série A) et ne contient pas les conditions de mise en service de l'usine de Lyon.

Bibliographie:


--Edwin Black / IBM et l'Holocauste. - Paris : Robert Laffont, 2001.- p. 373-383 sur René Carmille

--ML Lévy dans publications INED http://www.ined.fr/publications/collections/dossiersetrecherches/86.pdf  p28-35 sur le service de la Démographie